Tout un pan de la littérature contemporaine est travaillé par les questions d’héritage et de transmission, comme en témoigne la critique qui s’est abondamment attachée à ces notions. Le présent dossier de la revue
temps zéro interroge tout particulièrement la relation entre la transmission et ses échecs ou ses oublis, entre l'héritage et les traces de cet héritage. Les articles réunis ici donnent une idée de la prégnance de la transmission dans le champ de la littérature contemporaine. La transmission s’y joue non pas seulement dans les familles et à travers les générations, mais aussi
ailleurs – autant dans l’espace du rêve et du fantasme que dans celui des mots et des écrits, tant dans les lectures et les rencontres au quotidien que devant la caméra et sur la scène théâtrale.
Cet élargissement de la notion de transmission affecte en retour ce qu’on entend par héritage. Dans les œuvres ici à l’étude, l'héritage n'est pas uniquement compris dans la filiation biologique (ou génétique), dans ce qui se transmet entre les générations, mais aussi dans ce qui se transmet, au fil des années, d’une expérience, d'un événement. Ce que les articles montrent surtout, c’est que l’héritage n’est pas reçu passivement mais est à (re)construire par les héritiers et les héritières. Les lacunes et les silences de la transmission, en ce qu’ils déclenchent le travail de (re)constitution, peuvent ainsi être compris comme cela même qui rend possible – voire qui exige – la mise en œuvre de l’héritage.
Ce numéro a été dirigé par Anne Martine Parent et Karin Schwerdtner.
(photo : « Leviathan » d'Anish Kapoor, par Anne Martine Parent [détail])